L'Hindouisme
L'Hindouisme, génie intellectuel et spirituel
de l'Inde, est une terminologie que des voyageurs arabes, il y a plusieurs
siècles, ont cru bon
de prêter à la religion des peuples de l'Hindoustan.
On les a nommés Hindous en raison du fait qu'ils peuplaient
la région de l'Indus.
L'Hindouisme actuel est une fusion entre les cultes pratiqués
par les populations autochtones et celui importé par les Aryens
qui envahirent le Nord de l'Inde, puis le Sud, 2000 ans avant l'ère
chrétienne.
Le nom sanscrit de cet ensemble composite de traditions cultuelles
populaires, systèmes rituels védiques, purâniques
et âgamiques et témoignages scripturaires est en réalité le
Sanâtana-dharma, appelé aussi Ritam.
Sanâtana-dharma signifie "loi éternelle" ou "ordre
cosmique éternel", et ses potentialités s'incarnent
dans l'ordre social de la société humaine au travers
de l'institution sacrée des 4 castes appelées Catur-varna
(littéralement 4 couleurs).
L'inspiration védique de ce concept prend sa source dans le
célèbre hymne cosmogonique du rig-veda appelé "purusha-sûkta".
L’ « hymne de l'homme » universel dépeint
le démembrement d’un géant cosmique, un être
immense.
Sa tête devient les « Brahmana » (officiants du culte
et sage lettrés), son torse les « Kshatriya » (princes
et guerriers), son bassin et ses cuisses les « vaishya » (exploitants
agricoles et commerçants) et ses pieds les « shudra » (artisans,
artistes et bardes, serviteurs des trois autres castes).
Ces castes représentent en réalité les tendances
d’un ordre quadruple présentes dans toutes les sociétés
humaines.
Au fil des âges, en Inde, ces tendances se sont sédimentées
dans des castes devenues héréditaires.
D’autre part, l’emploi révélateur du terme « purusha »,
qui signifie personne humaine, induit en nous la notion que pour les
hindous, le transcendant est immanent en l’homme.
Pierre-Sylvain Filliozat, dans sa préface de l’ouvrage « La
religion de Shiva », oeuvre prodigieuse d’érudition
composée par Shrî Râmacandra Bhatt, a su justement
le souligner.
Le véhicule scripturaire originel du Sanatâna-dharma,
le Véda, renvoie au concept de "Shruti".
"
Shruti" a pour sens "ce qui a été entendu" par
les sages ("rishi"), les vérités éternelles
qu'ils ont entendues ou vues.
La tradition védique est dite "apaurusheya", d'origine
impersonnelle.
On qualifie l'hindouisme de religion védique éternelle,
car elle est supposée être une émanation directe
des vérités ou principes philosophiques et spirituels
de ritam.
C'est le fait qu'elle soit sans fondateur historiquement connu qui
atteste, selon les Hindous, de ses origines divines et son caractère éternel.
La shruti, ce qui a été entendu par les sages, sous son
acception védique, s'articule autour du "prasthâna-traya",
la "triple autorité", composée:
-Des Védas.
-Des Brahma-sutra
-De la Bhâgavad-Gîtâ.
Objets d’une considération particulière, nous
aborderons aussi la shruti théiste des
Â
gama théistes.
LES VEDAS
1. LES VEDAS
A) Analyse des concepts philosophiques et attitudes dévotionnelles
L'hymnologie védique exprime une inclination cultuelle que
l'illustre indologue allemand Max Müller a qualifiée d’hénothéisme.
L'hénothéisme consiste en une exaltation, une « intronisation » au
sommet du panthéon des divinités cosmiques, de la divinité préférée
(ishta-devata) auquelle est
dédié chaque hymne du rig-veda (le premier véda,
la science des mètres).
Ceci dit, cette attitude, initiée par le Rigveda, devra attendre
une époque beaucoup plus tardive pour être promue et codifiée
par des écoles doctrinales à caractère « sectaire ».
La notion d'ishta-devata, de divinité préférée
en tant que symbole vivifiant des plus hautes idéations spirituelles
du bhakta (dévôt) et sadhaka (méditant) deviendra
très populaire lors de l'ère post-védique.
En effet, la littérature des purana (prononcé pourana),
traités cosmologiques, suscitera une intense ferveur chez les
populations non-brahmaniques.
Les purana n’eurent aucune difficulté à s’imposer
comme autorité scripturaire auprès du peuple car les
Védas, dont le sens demeurait hermétique, obscure et
abstrait, restait le domaine de cercles brahmaniques.
Dans la vision dévotionnelle de mode hénothéiste,
toutes les autres divinités, qui coopèrent au devenir
cosmique, sont subordonnées à l’ishta-devata du
dévot.
S'inspirant de ce sentiment dévotionnel, pendant la période
post-védique, les fidèles cultivés commencèrent à identifier
leur divinité préférée à l'absolu
universel et immuable, l'entité cosmique non-duelle, informe
et incréée, l'être immense nommé "brahma".
La caste des lettrés et officiants du culte (poujârî)
est d'ailleurs appelée "brahmana".
Pour le commun des mortels de l’Hindoustan, qui cultivait une
dévotion simple, peut-être une vague intuition de ce Tout-Un
sous-jacent à la myriade des dieux prévalait, mais sans
qu’elle soit rendue consciente par la réflexion philosophique.
Pour le bhakta de l’Ishta-devâtâ, son dieu préféré est
le dieu suprême, et seule importe la vision mystique de ce dieu
ou l’effusion de sa shakti.
On pourrait aussi qualifier l'attitude dévotionnelle de type
hénothéiste de "monisme théiste".
C'est la traduction la moins fausse du terme advaita-îshvara
vâda.
C'est le nom donné à la doctrine de l'école originelle
du Shaiva siddhantâ, dont la paternité humaine est attribuée à rishi
tirumular, lui-même disciple d'un rishi mystérieux des
Himalâya se nommant Nandi-nâtha.
Aux dieux védiques tels que Prâjapâti (le père
des êtres), Varuna, Indra, Mitra, Soma, Surya, Vishnou et Rudra
succèderont les trois dieux de la triade cosmique (trimûrti),
qui sont brahmâ (la créateur), Vishnou (le "pénétrant" toute
chose, protecteur) et Shiva (le destructeur).
Certains des anciens dieux védiques tomberont dans les oubliettes
en assumant tardivement un rôle très mineur, tandis que
d'autres deviendront proéminents, jouissant d'un prestige et
statut dévotionnel de premier ordre.
Ce fut le cas de Rudra (le "terrible"), qui va se transmuer
en Shiva (le "bénéfique"), de Vishnou et de
la déesse.
Les courants doctrinaux sectaires principaux de l'époque « purânique » (les
Purana sont des traités de cosmologie), encore vivaces de nos
jours, sont connus sous les noms de Shivaïsme (avec ses 6 écoles
et Shiva pour dieu suprême), les écoles Vaishnava (le
Vishnouisme avec Vishnou pour être suprême) et le Shaktisme,
les écoles shakta (avec "shakti-devî", la déesse-puissance
comme matrice des trois mondes).
On ne trouve nulle part, dans les littératures védique
et purânique, de concept équivalent à ce que les
civilisations monothéistes appellent une révélation.
Ici, nous concevons la révélation dans son sens exclusif,
d'unicité, celle d'un Dieu céleste personnel, vengeur
et iconoclaste.
Ce concept est étranger à Hindu-dharma.
L'hindouisme est une religion trans-historique habitée d'un
esprit d'approche circulaire et cyclique de ce que l'on devrait plutôt
appeler des révélations.
L'hindouisme n'est pas une religion historique et prophétique,
ni une religion messianique de salut universel nourrie doctrinalement
par un dogme révélé.
Ce n’est pas du tout une religion au sens judéo-chrétien
ou islamique.
A tous âges de l'humanité, de nouvelles révélations
peuvent être faites par des sages.
Toutes ces expressions scripturaires, que sont les védas, itihâsa,
purana et âgama, forment des révélations plurielles.
Ces dernières émanent, en s'hypostasiant, d'une immensité inqualifiable
neutre appelée Brahman.
Ce fondement principiel est limpidement exprimé par les deux
versets védiques suivants:
1. "Ekam satyam, viprah bahuda vadanti": "La vérité est
une, les sages la nomment sous des noms différents".
2. « Ekam sat anekâ panthâ » : « La vérité est
une, les sentiers sont multiples. »
C'est en tous cas le sens que prête la pensée upanishadique
(prononcé oupanishadique) au substrat originel ou principe duquel
procèdent les trois mondes.
L'acception védique, quant à elle, prête plus à brahman
le sens de force sacrée née du sacrifice (yajna) que
celui d'essence universelle, dont la primauté serait antérieure à celle
du sacrifice, dont le dieu-feu agni est le régent.
B) Les textes
Les 4 Védas sont des textes très anciens. Ces sont des
récueils d'hymnes et de prières. On attribue leur mise
en forme à Veda-Vyâsa, qui en aurait transmis un à chacun
de ses disciples.
Chaque Véda est composé de quatre parties:
1. Les samhita.
2. Les brahmana.
3. Les Aryanaka
4. Les Upanishad.
Les samhita sont les compositions les plus archaïques et elles
consistent en des recueils de mantra (syllabes sacrées) formulés
en sanscrit ancien.
Les brahmana, en prose, élucident le sens des samhita.
Les âranyaka (livres de la forêt) sont des traités
destinés aux ascètes et aux ermites afin qu'ils puissent
se libérer du joug du karma (loi de rétribution causale),
mettre fin à la roue des morts et des réincarnations
(punar-janma) et atteindre la libération (moksha).
Comme l’affirme le Pandit et très grand spécialiste
sanskritiste de l’hindouisme en général et du shivaïsme
en particulier, Shrî Râmacandra Bhatt, dans « La
religion de Shiva » (page 204): « Les âranyaka forment
une transition entre le rituel brâhmanique et les tendances à la
spiritualité qui atteignent leur sommet dans les périodes
upanishadiques et bouddhiques. »
Les Upanishad sont des considérations philosophiques ou leçons
métaphysiques autour de ces enseignements.
Ce même Pandit déclarait plus loin, dans l’ouvrage
précité (page 205) :
«
Les upanishad vont encore plus loin. Elles préconisent une voie
plus élevée, celle de la pure connaissance. Avec elles
le ritualisme passe à l’arrière-plan. Des passages
déconseillant ou même, dans quelques cas, condamnant les
pratiques sacrificielles, ne sont pas rares. Elles ne s’intéressent
jamais à la glorification des dieux, comme dans le rigveda,
ni ne s’occupent de l’élaboration des rites comme
les Brâhmana. »
La notion de "âtma-vidyâ" (science du Soi) est
centrale dans la littérature upanishadique.
Il existe plusieurs versions de chacun de ces recueils autant que de
collèges liturgiques.
Cependant les hymnes sont quasiment identiques, les autres textes se
complètent souvent et les Upanishad varient dans la forme mais
pas dans le fond.
Le premier recueil d'hymnes, le Rig Véda (la science des mètres),
est composé d'hymnes aux anciennes divinités de la nature
vénérées avant l'arrivée des Aryens ???.
Tous les autres textes s'y sont greffés ultérieurement
et ont été organisés en trois volumes également
intitulés Védas.
Il daterait d'au moins 3500 avant J.C.
Il débute par la formule d’invocation :
« Om agnim hile purohitam yajnasya devamritvijam hotaram
ratna dhatamam.”
“
Om, je vénère la Divinité immortelle, le feu sacré,
le prêtre, le Maître du sacrifice, le dispensateur de tous
les joyaux et de tous les trésors. »
Les versets les plus primitifs du Rig Véda parlent de la nature
et des divinités telles que Agni, Surya et Indra.
Dans les versets plus tardifs apparaît le concept d'être
suprême.
Le terme "rig" signifie mètre dans le sens de mètre
poétique ou bien "prière ou psaume".
Le Rig Véda est divisé en dix livres (mandala) et comporte
1028 hymnes.
La plupart d'entre elles se retrouvent dans le Yajur Véda et
le Sama Véda.
Le livre invite l'homme à la quête du Divin.
Pour les Hindous, le Divin peut-être envisagé à la
fois sous les aspects de Nirguna-brahma (absolu universel dénué de
qualités, réalité non-manifestée) et de
saguna-brahma (le divin doué de qualités car qualifié et
personnifié car il s’hypostasie dans la manifestation).
En somme la conscience originelle de laquelle ont émergé/émané les
trois mondes peut se concevoir à la fois comme principe cosmique
ou comme personne divine.
Le rig veda contient le Jnâna-yoga (yoga de la connaissance).
Le plus important des dieux est Agni, le feu purificateur du sacrifice.
Jusqu’à nos jours, les cérémonies de purification
par le feu portent l’appellation de Agni Homam.
Les autres dieux principaux sont Soma, Mitra (divinité diurne
régente du jour) et Savitar (Surya: le soleil), Vishnu, qui
prendra une place prépondérante plus tard, Indra, le
roi des dieux et chef de leur armée, Vayu, Pusan, les Marut,
jeunes guerriers fils de Rudra qui vit sur la montagne.
C'est lui que l'on nommera tardivement Shiva, le "bénéfique".
Le passage du concept de Rudra (le "terrible") à celui
de Shiva (le "bénéfique") est d'ailleurs manifeste
dans la Shvevashvatara-Upanishad, considérée comme la
première Upanishad théiste du Shivaïsme.
Le recueil du Rig-Veda contient aussi des hymnes à l'Aurore, à la
Terre, à l'eau, à l'immensité ("Aditi")
identifiée à l'espace et à des divinités
mineures.
Le deuxième recueil, appelé Yajur-Veda (Yajur signifie "vénération
ou sacrifice")
consiste en des psaumes en prose qui doivent être récitées à voix
basse.
Il contient la sagesse du sacrifice. Il enseigne le karma-yoga (yoga
de l'action).
Le troisième recueil, appelé Sama-Veda ("Saman" signifie
destructeur des fautes
ou souillures), est un recueil de 1058 chants.
La plupart des textes qui y figurent sont des versets du Rig-Veda adaptés à une
mise en musique.
Le quatrième recueil s'intitule Atharva-Veda. C'est une compilation
de formules magiques, d'exorcisme et de poésies. Il est le plus
récent des Védas.
Il tire son nom du prêtre auquel on l'attribue, "Atharvan".
2) Les Brahma-sutra
Les Brahma-Sutra, ou aphorismes de "brahma", composés
par Shrî Badarayana,
complètent les révélations védiques.
Ils en sont un prolongement incontournable et forment un corpus scripturaire
primordial en tant que réflexions philosophiques sur le sens
du Véda et la formulation de la Vaidika-Vidhi (la loi védique).
Haut de page
La Bhagavad-Gîtâ, ou "chant du Seigneur", plus
connu en Occident, est exprimée sous forme d'un poème métaphysique et épique.
Ce dernier retrace un dialogue entre Krishna, considéré comme
le 8ème Avatara (incarnation, littéralement "descente")
du Dieu Vishnou et l'archer Kshatriya (prince et guerrier) Arjuna.
La gîtâ met en exergue la voie royale pour atteindre la
libération dans l'âge des conflits et de fer ("kali-yuga"),
qu'elle prône comme étant le bhakti-yoga, yoga de la dévotion.
Toutes les autres formes de yoga (jnâna-yoga, karma-yoga, etc.),
dans la vision de la gîtâ, culminent dans le yoga de la
dévotion, le bhakti-yoga, qui en est la parachèvement
de perfection ultime.
La gîtâ n'enseigne pas l'ascétisme et le monachisme,
mais le renoncement aux fruits de l'action.
Elle encourage le dévot à les sacrifier mentalement au
Purushottama, la personne suprême, car il en est l’auteur
ultime et sous-jacent.
C’est la puissance d’illusion appelée mâyâ,
qui induit dans le jîva, l’être incarné, la
croyance erronée qu’il est l’auteur et le jouisseur
des fruits de ses propres actions.
Dans le châpitre XII, Krishna déclare à Arjuna
:
«
ye tu sarvâni karmani mayi samnasya mat-parâh/ananyen’aiva
yogena mâm dhyâyanta upâsate//Teshâm aham samuddhartâ mrityu-samsâra-sâgarât/bhavâmi
nacirât pârtha mayy âveshita-cetasâm// »
«
Mais Ô fils de Prtha bientôt émanciperai-je de cet
océan de l’existence conditionnée et vouée à la
mort, ceux dont l’esprit est toujours consacré à Moi,
ceux qui m’abandonnent les fruits de toutes leurs actions ainsi
que l’illusion d’en être les auteurs et qui me vénèrent,
méditant sur Moi comme leur seul refuge et unique amour. »
Dans la vision de la gîtâ, le monde de l'action est champ
d'accomplissement du dharma, du "devoir" sacré, et
non un lieu que l'on a pour vocation de déserter pour s'isoler
dans une ascèse silencieuse et immobile.
Arjuna souffre d'un insupportable dilemme car il doit combattre les
siens, qui constituent l'armée des fils de Dhritarashtra.
Ils ne peut non plus se défaire du code d’honneur et l’exhortation à livrer
le combat avec héroïsme, courage et bravoure car il appartient à l’ordre
sacré des princes et des guerriers.
Alors Krishna l'invite à accepter de combattre au travers d'une
série d'enseignements de yoga de la dévotion et de l'action.
Nous pouvons aussi citer la célèbre strophe:
"
sukha-duhkhe same kritvâ lâbh'âlâbhau jay'âjayau/tato
yuddhâya yujyasva n'aivam pâpam avâpsyasi//"
"
Traitant avec un esprit égal le plaisir et la douleur, le gain
et la perte, la victoire et la défaite, tiens-toi prêt
pour la bataille. Ainsi, tu ne commettras point de faute".
4) Les Âgama théistes.
Considérés comme des prolongements d’expression
plénière de la Shruti par leurs adeptes « sectataires »
(« secte » au
sens non péjoratif du terme est une traduction possible pour « sampradâya »),
mais souvent non-reconnus par l’orthodoxie brahmanique, en particulier
par les brahmanes hindous des écoles Vaishnava, les Âgama
consistent en des révélations faites par chacune des
trois divinités tutélaires suivantes :
-Shiva
-Vishnu
-Devi.
Les âgama shivaïtes, « shivâgamam », par
exemple, sont des révélations faites par la shakti de
Sâdashiva, qui siège au centre du mandala ayant pour régents
des quatre points cardinaux les déités suivantes :
A l’est trône tatpurusha.
Au sud aghora.
A l’ouest sadyojata.
Au nord Vâmadeva.
Des shakti respectives de ces quatre dieux les quatre védas
sacrés ont été exhalés, tandis que sâdashiva
enseigne les âgama depuis le coeur du mandala.
Chaque âgama shivaïte, par exemple, contient des portions
appelées pâda (littéralement « pied »).
Chârya-pâda, la première, appelée aussi « dâsa-mârga »,
la voie du dévot ou serviteur, est corollaire du culte du temple
avec la dévotion enthousiaste d'une pratique "novice".
Par kriyâ-pâda, le dévot commence à réaliser
l’harmonie complémentaire qui règne entre Jnâna
(connaissance) et Bhakti (dévotion), et le service d’adoration
dévotionnelle de Shiva dans le Koyil (temple) devient quelque
chose de naturel et spontané pour lui, sans qu’il ait
le sentiment de se forcer.
C’est le "sat-putra mârga", la voie du vrai fils
de Shiva.
Par Jnâna-pâda se révèle la connaissance
de la « Shivaïté » mais sous la forme de Apara-mukti,
libération non-transcendante.
Elle est aussi appelée « Sakha-mârga », la
voie du compagnon ou ami (de Shiva).
Avec yoga-pâda, l’union avec Shiva, par la parfaite union
de Jnâna et bhakti, est atteinte et par la même para-mukti,
libération dans le Shiva transcendant, quand le Soi se résorbe
dans l'entité non-manifestée siégeant hors de
l'espace, du temps et de la causalité.
Elle est connue et révérée sous le nom de « San-mârga »,
voie du saint.
Les Shivâcharya (précepteurs du culte Shivaïte),
brahmanes officiants de descendance tamoule, perpétuent de nos
jours au Tamil-Nadu le Shivaïsme âgamique qui, bien qu’également
nourri d’éléments Védiques et purâniques,
est doté d’une personnalité bien distincte de la
tradition védique du Nord de l’Inde.
Parmi les Shiva-âgamam, nous pouvons citer les mrigendrâgama,
kâmikâgama, rauravâgama, karanâgama ou encore
suprabhedâgama.
Voici les thèmes abordés par les âgama shivaïtes:
1. Pancakritya : les 5 fonctions de Shiva sous son aspect « parameshvara » (souverain
suprême des trois mondes) ou « natarâja »,
seigneur de la danse :
shrishti (émanation ou création)
stithi (protection)
samhâra (destruction)
tirobhâva-shakti (puissance d’obscurcissement)
anugraha-shakti (puissance de saisissement par laquelle on obtient
la libération des trois impuretés fondamentales (trimala),
par la grâce de Shiva).
2. Les trois catégories qui sont :
Pati : le seigneur des âmes enchaînées qui les voilent
d’inscience ou les libère.
Pâshu : les âmes transmigrant et victimes de l’égoïsme,
du karma, de l’illusion et de l’ignorance.
Pâsha : le lien qui lie les âmes au devenir cosmique et
au cycle des morts et des réincarnations d’une part, et à Shiva
qui les libère d’autre part.
3. Trishakti, les trois puissances du Shiva dans l’univers manifesté et
par lesquelles il émane de son être océanique le
plan cosmique:
Iccha shakti : puissance de vouloir.
Kriyâ shakti : puissance d’action.
Jnâna shakti : puissance de la connaissance.
4. Les trois aspects du divin qui sont :
Parashiva : le Shiva transcendant, siégeant au-delà du
crée et des tattva, réalités principielles ou
niveaux d’énergies qui permettent le passage des degrés
les plus subtils aux plus grossiers de la manifestation cosmique.
Sa mûrti, son corps solide du sanctuaire est le phallus, le linga
(littéralement « signe »).
Parashakti : la puissance suprême, l’axe de l’univers
qui est l’élément cohésif des trois mondes,
représentée par le lingodbhâva-mûrti, le
phallus infini qui embrasse les profondeurs béantes de la terre
et l’immensité illimitée des cieux, tel un insondable
pilier de lumière.
L’ardhanarîshvara, l’androgyne primordial, mi shiva
mi shakti, en est la mûrti dans les sanctuaires.
Parameshvara, aux cinq fonctions déjà décrites
plus haut, et qui siège dans les temples en tant que seigneur
de la danse.
5. Guru-shishya parampara : la tradition de maîtres à disciples.
6. Mantra-dîkshâ : l’initiation aux mantra.
7. Le shaiva-samkhya : la cosmologie ou énumération
des principes cosmiques par lesquels la sphère du shiva suprême
s’émane en manifestation cosmique.
Le samkhya shivaïte en énumère 36 classifiés
en shuddha-mâyâ tattva (pures tattva), shuddhâshuddha-mâyâ tattva
(tattva à la fois pures et impures), ashuddha-mâyâ tattva
(tattva impures).
Une des meilleures présentations qui en ait été faite
le fut par Shrî Râmacandra Bhatt, dans son ouvrage prodigieux
d’érudition sur le Shivaïsme « La religion
de Shiva » :
«
L’univers est manifesté en trente-six catégories
de tattva « réalités » : 1) Shiva, 2) Bindu
ou Sadâshiva, 3)Îshvara « Seigneur », 4)Shuddha-vidyâ « pure
connaissance », 5) Mâyâ, 6) kalâ (principe
d’action), 7) vidyâ « connaissance », 8) râga « passion »,
9) kâla « temps », 10) niyati « régulation
(des actes passés) », 11) purusha « personne »,
12) prakriti ou avyakta « (matière originelle, non-manifestée »,
13) guna « qualités (de la matière originelle) »,
14) buddhi « intelligence », 15) ahamkâra « ego »,
16) manas « esprit », 17) shrota « ouïe »,
18) tvac « peau », 19) netra « vue », 20) jihvâ « langue »,
21) ghrâna « nez », 22) vâc « parole »,
23) pâni « main », 24) pâda « pied »,
25) pâyu « anus », 26) upastha « organe génital »,
27) shabda « son », 28) sparsha « toucher »,
29) rûpa « forme », 30) rasa « goût »,
31) gandha « odeur », 32) âkâsha « espace »,
33) vâyu « vent », 34) agni « feu »,
35) ap « eau », 36) prithvi « terre ».
Ces réalités composant l’univers sont gouvernées
par la shakti « puissance » subdivisée en cinq kalâ « parties » :
nivritti, pratishthâ, vidyâ, shânti, shantyatîta.
La Nivritti kalâ gouverne par le seul tattva de la terre (n° 36),
la pratishthâ les tattva de l’eau à la prakriti
(n° 12 à 35), la Vidyâ les tattva mâyâ à purusha
(n°5 à 11) la Shânti les tattva Shuddhavidyâ, Îshvara
et Sadâshiva et la shântyatîta le tattva Shiva.
Différents mondes, au nombre de 224, sont distribués
dans les différents tattva. Les tattva 1 à 4, Shiva,
Sadâshiva, Îshvara et Shuddhavidyâ sont dits purs.
Les autres sont impurs. »
Dans cette perspective, la libération, pour l’adepte
fortuné de la voie tantrique et âgamique, est atteinte
s’il peut défaire en lui-même tous les liens crées
par les 36 tattva, du plus grossier au plus subtil.
Pour les écoles monistes du Shivaïsme âgamique, telle
que le Shaiva-siddhânta primitif appelé Nandinâtha-sampradâya
(communauté doctrinale du maître de Nandi) ou encore le
courant majeur du Shivaïsme du Cachemire, il y a résorption
du jîva dans le principe suprême dans un état d’union
indistincte et indifférenciée.
Pour les écoles dualistes, telles que l’ « Aghorashiva-paddhati » ou
encore les pashupâta, encore très présents dans
le Népal actuel, les trois catégories de pâti,
pâshu et pâsha sont éternelles.
Dans cette vision, l’union avec parashiva signifie que l’âme
libérée demeure une essence spirituelle jouissant du
même état de félicité que le shiva suprême
mais qu’elle en demeure une émanation différenciée.
La Smriti
La «Smriti », terme sanscrit qui signifie littéralement « mémoire »,
est ce qui a été transmis de générations
en générations.
La smirti est composée des itihâsa (épopées)
que sont le Mahâbhârata et le Râmayâna, des
traités de légendes cosmologiques, les purana cités
précédemment, et de quelques traités inspirés
tels que les yoga sutra de Bhagavan Patanjali ou encore le Hatha yoga
pradipika de Gorakhnâtha (disciple de Matsyendranâtha).
La Smriti n’est pas considérée comme étant
moins sacrée que la shruti.
Elle permet en tous cas à des populations simples de cultiver
une dévotion profonde et d’appréhender le plan
divin et cosmique sur un angle plus mythologique que philosophique.
La philosophie demeure l’apanage des élites intellectuelles
et lettrées.
Les traités purâniques d’idéologie religieuse
shivaïte, « shaivam », sont les shiva purana, linga
purana, skanda purana, kurma purana, matsya purana et brahmanda purana.
Le purana d’inspiration vaishnava (vishnouïte) le plus célèbre
est le bhagavata purana.
Les purana principaux qui dérivent leurs énergies de
Shakti devi, la « déesse- puissance » sont les Devî Bhâgavata
Purâna et Devi purâna.
Sur le plan de la thématique, le prototype même du purana
complet nous est offert par le Bhagavata purana qui aborde:
1. Les cycles d’émanation (srishti), de protection (sthiti)
et de dissolution (samhâra) de l’univers.
2. Les dynasties de rois mythiques solaires et lunaires (sûrya
vamsa et candra vamsa).
3. Les manvantara, les cycles d’âges successifs qui constituent
un jour de brahmâ, présidés chacun par un manu
(un père et ancêtre mythique).
4. La généalogie des dieux et des patriarches.
Les purâna relatent les exploits mythologiques des dieux et
les mythes mettant en relief la primauté en gloire et en puissance
d’un dieu sur ses rivaux.
Brahma et Vishnu se querellaient et cherchaient à savoir lequel
des deux était le plus puissant sur les trois mondes.
Alors, le phallus de feu de Shiva apparut tel une colonne de lumière.
Brahma épousa la forme d’un cygne (hamsa) et ne put scruter
la voûte du phallus (linga) par son envol.
Vishnu se transforma en sanglier sauvage et ne put creuser les profondeurs
béantes de la terre pour toucher le fond du linga.
Alors, ils durent se résoudre à admettre la suprématie
et la précellence de Shiva sur tous les dieux.
C’est sous l’influence de la période purânique
que les offrandes simples à base de fruits, de fleurs, etc...
faites par les fidèles, deviendront populaires car plus accessibles
aux populations simples.
En effet, les yajna védiques et leurs arcanes rituelles complexes
demeuraient la spécialité exclusive des brahmanes poujari.
Les enseignements de l’advaita-vedanta (les conclusions non-dualistes
de la fin du Véda) de l’illustre pandit Shrî Âdi
Shankarâchârya et son école connu sous le nom de
Smârta (de « smirti », mémoire) préconise
aux fidèles une méthode rituelle simple de âtmârtha-pûja
(cérémonie dévotionnelle pour son propre bénéfice)
pratiquée au domicile familial.
La propitiation d’un dieu, lors d’un rituel appelé « archanaï » en
tamoul sanscritisé, ponctuée par la récitation
des 108 ou 1000 noms du dieu qui y préside, est un pratique
d’essence purânique.
De plus, dans les purâna, des notions comme tapas (traduit par
austérité) s’y voient conféré un
sens différent du sens védique originel.
Voici des extraits des déclarations faites à ce sujet par Srî Râmacandra
Bhatt dans « La religion de Siva » (Pages 209 et 210 Chapître
II « Le Tapas »):
«
Le mot tapas « ascèse » est d’emploi très ancien.
Dans un des hymnes tardifs du Rig Veda, par exemple, les sages (rishi) sont
dits se livrer à la pratique du tapas (X.109.4). Dans le même
hymne la vérité et le droit, et avec eux tout l’univers,
sont dits être nés du tapas (X.109.1). Dans le célèbre
Nâsadîya-Sûkta (X.129) le tapas joue un rôle important
dans la création de l’univers. Dans l’Atharvaveda le premier
pilier (skambha) est dit être sorti de shrama « peine, effort » et
tapas (X.7.38). Il est aussi dit que c’est par le tapas avec lequel il
remplit ses devoirs, que l’étudiant brâhmanique (brahmacârin)
satisfait son maître, les dieux et les royaumes de l’espace, puis
s’élève aussi haut que le soleil protégeant les
mondes, etc. (AV XI.5)... Le mot tapas a pour sens premier la chaleur et le
développement sémantique conduisant de l’idée de
chaleur à celle de ferveur ascétique, puis au concept d’ascèse
même est aisément compréhensible. Bien qu’à l’époque
tardive il note des formes variées de mortifications, originellement
la chaleur a dû en être le principal instrument. Une autre caractéristique
du tapas est sa relation étroite avec le yoga. La discipline psychique
visée par le yoga présuppose une grande austérité physique,
ce qui implique le tapas. Comme le yoga de certaines écoles, le tapas
des Pûrana est un culte centré autour d’une divinité.
La mortification du corps et le contrôle total des sens préviennent
la dissipation des énergies et favorise par là-même la
concentration sur la figure divine. La mortification de soi-même et la
concentration sur la divinité sont les deux traits saillants du tapas...Le
tapas est donné dans les épopées et les Purâna pour
un puissant rival du Yajna. Ce sont surtout les purâna qui réservent
au tapas une place plus élevée que le sacrifice...L’ascèse
est parfois mêlée au sacrifice. On voit dans le Mahâbhârata
un sage pratiquer le tapas pendant longtemps sans en obtenir l’apparition
du dieu qu’il souhaitait, et finir par s’offrir lui-même
en oblation dans le feu d’un sacrifice. C’est quand le sage est
prêt de finir ainsi ses jours que la divinité apparaît et
satisfait ses désirs (Mahâbhârata. X.7.54-68) ».
Les purâna scellent une continuité dans la différenciation
mais non dans la rupture entre le brahmanisme védique et l’hindouisme
populaire.
Même si les traités (shastra) de la smirti ne sont pas
révérés comme des révélations directes,
leur apport est très précieux.
Ils contribuèrent de surcroît à intégrer à la
tradition hindoue le culte des images, comme éléments
d’inspiration de la dévotion et supports de méditation.
Ainsi, au fil du temps, le Omkâra, la syllabe sacrée Om,
fut identifié au seigneur qui pose ou lève les obstacles,
le dieu-éléphant Ganesh
.
Par ailleurs, le mantra Gâyatrî, formule la plus sacrée
de la tradition brahmanique, fut personnifié sous la forme de
la déesse Gâyatrî, aux bras et aux têtes multiples,
vénérée comme veda-mâtâ, mère
du Véda sacré.
Plus tard, il y eut de nombreux mantra gâyatrî dédiés
chacun à une divinité particulière.
Ils sont généralement considérés comme
leur formule sacrée d’invocation la plus efficace sur
le plan mystique.
Les deux formes de contemplations spirituelles
A) Saguna-upâsanâ
La « saguna-upâsanâ » est la contemplation
spirituelle du divin doué de formes et de qualités.
La visualisation mentale y est primordiale.
Les personnes profondément imprégnées de culture
biblique et qui croient que Dieu est invisible et proscrit le culte
anthropomorphe des images douteront de l’efficacité d’une
telle pratique.
Pour les hindous qui s’y adonnent, c’est une pratique très
efficace et bénéfique, car le « citta-ekagrata »,
la focalisation de l’esprit sur un objet unique de concentration,
peut conduire à des états instases mystiques appelés « samâdhi ».
Le support de cette forme de méditation peut-être une
figure divine invoquée par un « dhyâna-shloka »,
un verset d’invocation méditative qui donne une description
formelle et symbolique du dieu à visualiser, ou bien un yantra.
Voici un verset faisant l’objet d’une grande révérence,
car il invoque la déesse Gâyatrî :
«
Muktâ-vidruma-hema-nîla-dhavala-cchâyair-mukhair-tryakshanaih
Yuktâm indu-nibaddha-ratna-mukutâm tattvârtha varnâtmikâm
Gâyatrîm varadâbhayânkusha-kashâm shubram-kapâlam-gadâm
Shankham-cakram athâravinda-yugalam hastair bhaje. »
«
J’adore la Déesse Gâyatrî, la personnification
des varna (lettres de l’alphabet sanscrit) signifiant la vérité suprême,
avec ses cinq faces bienveillantes reflétant les éclats
lumineux des perles, des corails, de l’or, du saphir, et de la
neige-chaque face étant constellée de trois yeux (dénotant
l’omniscience)-, dont la tête est ornementée d’une
couronne de joyaux ornée d’un croissant lunaire, avec
deux mains (parmi dix, représentant l’omnipotence) aux
gestes symboliques de dissipation de la peur et de don d’aubaine,
et qui dans ses deux autres mains tient l’aiguillon, le fouet,
le crâne blanc, la massue, la conque et le disque (comme symboles
inspirant la terreur aux forces démoniaques), et une paire de
lotus (comme symboles de pureté, d’amour, de dévotion
et de détachement). »
Les yantra sont des diagrammes symboliques dédiés à des
divinités masculines ou féminines, chargés de
shakti, forces spirituelles, auquel le « sadhaka » (méditant)
se relie par des récitations de mantra (« mantra-japa »).
B) Nirguna-upâsanâ
La contemplation spirituelle sur l’aspect informe (nirkâra)
du divin dénué de qualité est la plus abstraite
et la plus ardue qui soit.
Elle requiert, pour son succès final une purification mentale
préalable qui est l’apanage de quelques aspirants fortunés à l’état
de libération.
Elle consiste à fixer le mental sur la quintessence nue de quelques
mahâvakya (grandes sentences) tels que « Aham Brahmasmi » (« Je
suis le Brahma ») ou encore « So Aham » (« Je
suis celà »).
Plus le mental du sadhaka (méditant) est affiné par le
manasa-japa (récitation mentale) du mahâvakya, plus le
sentier de la libération s’éclaire.
L’imprégnation du mental du méditant par le concept
abstrait et l’énergie propre au mahâvakya conduit à une
grande paix qui s’insinue dans les profondeurs de l’être.
Généralement, le commun des mortels est peu enclin à s’adonner à ce
genre de pratique réservée le plus souvent aux renonçants.
Lambrou Dharmachandra
Haut de page
Puja
Questions/Réponses
Le sens des cérémonies ayant lieu au temple
Les Shivâchârya reçoivent une éducation religieuse rigoureuse durant leur enfance et ils reçoivent en premier lieu la samânya-dîkshâ (initiation générale de base) étant enfant et ensuite la nirvâna-dîkshâ ("initiation de l'extinction (en Shiva) qui est reçue au moment de
leur mariage.
Ils sont alors aptes à officier le culte dévotionnel du temple.
Ils existent plusieurs types de cérémonies.
Par exemple archanaï consiste en la récitation de mantras ("mantra-japa") et en aspergeant
la mûrti ("corps solide" ou statue) d'une divinité et de s'attacher son énergie bénéfique par rapport à un souhait.
Ceci est pratiqué sur la demande expresse et spécifique d'un fidèle.
Il existe notamment une pratique qui s'appelle "moksha-archanaï" et qui est conjointement faite par le dévot et le Poujârî (prêtre officiant le culte) aux fins de protéger spirituellement un défunt afin que ce dernier, dans sa nouvelle réincarnation, puisse atteindre la libération.
Il existe aussi la pararthâ-Pûjâ qui est le culte pour le bénéfice d'autrui et qui est invariablement pratiquée pour tous les dévots présents dans le temple sans requête particulière faite par un dévot spécifique.
Un aspect très crucial pour la préparation de cette pûjâ est le bain rituel de la mûrti d'une divinité, le plus souvent Ganesh, appelé "abhishekham".
Les Shivâchârya sont de descendance tamoule et d'obédience Shivaïte et ils sont souvent perçus, en Inde du Nord, comme les fervents rivaux de la grande tradition indo-brahmanique orthodoxe du Nord.
Le feu est un élément fondamental des rituels sacrificiels car l'univers, dans le Rig-Véda, est dit être né du sacrifice de l'homme (dans l'hymne appelé "Purusha-sûkta") cosmique dont le démembrement a donné lieu à des spéculations sur les quatre castes (catur-varna).
En effet sa tête est devenu les Brahmanas (prêtres), sont buste les Kshatriyas (princes et guerriers), ses hanches et cuisses les Vaishyas (propriétaires terriens et laboureurs) et ses pieds les Shudras (artisans et serviteurs des trois autres castes).
Ceci dit les méthodes rituelles utilisées au Kovil "Shrî Manicka" sont préconisées dans des textes sacrés Shaiva (Shivaïtes) appelés le Karana-Âgama et le Kâmika-Âgama.
Un aspect fondamental du rituel se nomme en sanskrit "Karpura-niranjanam" ou "Ârati", le fait de brûler du camphre et de réciter des mantras devant la mûrti d'une divinité.
Qui vient au temple et pourquoi ?
Le plus souvent les fidèles viennent plus pour s'attirer les pensées bienveillantes des Dieux par rapport à des souhaits non-exaucés dans leur vie quotidienne plutôt que pour méditer sur ces Dieux.
Ceci dit, il existe des exceptions et surtout il faut se souvenir qu'il existe plusieurs niveaux de pratique.
Par exemple la Déesse Lakshmî (déesse de la prospérité littéralement la "millionnaire"), parèdre du Dieu Vishnou (le protecteur de l'univers), est invoquée pour acquérir de la prospérité et s'assurer une aisance financière.
La déesse Kâli (le temps universel qui emporte toutes choses), forme courroucée de la déesse Durga, est invoquée pour la protection des enfants en bas âge mais aussi pour ses qualités de destructrice de la vie, car si elle est le temps qui emporte toutes choses, elle n'a rien à craindre et sa toute-puissance est dispensatrice de craintes de la mort qui est le lot de chaque être vivant.
En l'invoquant, on transcende ses propres peurs de mourir.
Mais, par le fait qu'elle tue les démons, Kâlî peut être aussi conçue comme la déité tutélaire idéale pour se purifier des souillures du mental (klesha), représentées par les asûras (anti-dieux, titans ou démons), et faire du progrès spirituel.
On peut méditer sur elle également.
Chaque déité remplit une fonction cosmique particulière et ce qui est expliqué ici ne saurait être une compréhension exhaustive du panthéon hindou et son immensité.
Qui est Ganesh et pourquoi le vénère-t-on ?
Ganesh est le seigneur des obstacles, appelé en Sanskrit Vighneshvara, qui posent ou lèvent les obstacles multiples aux réalisations matérielles et spirituelles.
Dieu au corps d'homme et à tête d'éléphant, il est celui que l'on invoque en premier au début de toute quête spirituelle, entreprise commerciale, étude (pour l'étude on invoque aussi la déesse Sarasvâtî, déesse du savoir), voyage, etc.
Il permet par son intercession bienveillante à accéder à la bénédiction de tous les autres Dieux.
Il est le seigneur des Ganas (les génies placés sous les ordres de son père Shiva), sens véritable du mot Ganesh.
Une légende raconte que la déesse Parvati, parèdre du Dieu Shiva, avec les sécrétions de sa peau, pendant que son divin époux Shiva s'est absenté du foyer conjugal, avait façonné un être divin à qui a été intimé l'ordre de garder l'entrée de la maison.
Shiva, se voyant refusé l'entrée par cet être qu'il ne pouvait identifier, le décapita à l'aide de son trident.
Inconsolable, la déesse Parvâti fit à Shiva la requête de remplacer la tête découpée.
Il trouva en substitut une tête d'éléphant qu'il plaça en redonnant naissance à l'être divin défunt, né sans l'intervention d'un utérus.
Certains spéculations théologiques attribuent à la tête d'éléphant la fonction d'être universel (l'absolu le "Brahman") et au corps humain la fonction d'être individuel ("âtman") et son corps symboliserait l'union du microcosme et du macrocosme.
Ganesh est appelé aussi affectueusement appelé par les tamoules "Pillaiyar", le "fils".
Une présentation initiation (simple) à la religion hindouiste, de ses origines et de ses textes.
L'hindouisme est appelé sanâtana-dharma, la religion éternelle, car elle est sans fondateur historique.
Ses textes sacrés existent en quantité innombrable, mais les textes d'origine s'appellent les Védas, compilé au nombre de quatre: le Rig Veda, le Sâma Veda, le Yajur Veda et le Atharva Veda.
Les Védas sont des hymnes aux divinités qui conduisirent tardivement à d'intenses spéculations métaphysiques contenues dans le Védanta ( les conclusions de la "fin du Véda") et la littérature des Oupanishad. Dans ces dernières, il y est question de l'union entre l'âtman et le Brahman, le soi intérieur et l'absolu, le substrat universel.
Le Brahman est un absolu sans visages qui transcende tous les Dieux, il est l'Un sans second.
Même s'il est supposé être l'Être absolu par excellence, il n'est pas toutefois l'équivalent de ce que les religions monothéistes appellent "Dieu".
En effet, il est étranger à tout dessein, plan cosmique et intention rédemptrice.
Dans l'hindouisme, il est plutôt question de libération de la roue des morts et des réincarnations (moksha) que de salut dans un paradis éternel à la mode biblique et évangélique.
Comment devient-on prêtre ?
On nait dans une famille de Brahmanes et dans cette caste de "Thakur", de purs des purs.
La fonction de Shivâchârya ou d'autres Brahmanes de n'importe quelle autre partie de l'Inde est héréditaire.
Quand on est né dans une caste brahmanique, à condition que l'on se destine au culte du temple, on étudie enfant dans une école spéciale qui s'appelle "Pâthashala" pendant six ans.
Le nombre de mantras, de types de homam (cérémonies sacrificielles de feu où on brûle toutes sortes d'ingrédients) à mémoriser est considérable et le problème de la pureté et de l'impureté rituelle prédomine dans la vie d'un Brahmane.
Les Shivâchârya, pour leur part, ne peuvent officier au temple que s'ils reçoivent la nirvâna-dîkshâ au moment de leur mariage à partir de l'âge de 20 ans.
Ppourquoi les fidèles viennent-ils au temple, comment vivent - ils leur foi, qui sont-ils ,
Ils viennent souvent, surtout en France où ils sont des expatriés, pour retisser des liens avec leur clan communautaire et avec la tradition ancestrale.
Leur foi, car ils sont hindous, fait que pour eux le profane et le sacré sont constamment mélangés et que tous les actes de leur vie quotidienne sont sacrés et ont valeur de rituel et hommage au Divin.
En effet, il n'existe pas d'équivalent, dans la religion hindoue, de ce que les Français considèrent comme étant la laïcité, c'est-à-dire la relégation de la religion à la sphère privée, d'abord en raison de la dimension sacrée et métaphysique des castes, mais aussi par le fait que l'hindouisme est une religion cosmique.
En effet, le fait que le Judéo-christianisme a eu une approche verticale de Dieu fait qu'il a toujours conçu l'existence d'un vacuum entre ce bas-monde et le royaume des Cieux, a donné, dans les temps modernes, lieu à la dissociation des pouvoirs spirituels et des pouvoirs temporels.
La plupart des fidèles du temple Srî Manicka sont tamoules et srilankais mais il y aussi des indiens, des mauriciens, des hindous originaires de Guadeloupe, de l'île de la Réunion mais aussi quelques Occidentaux et quelques Guadeloupéens qui trouvent dans l'hindouisme une manière de communier avec les Dieux de la nature, chose qu'ils ne peuvent faire dans la religion catholique.
Haut de page
|